CMV Congénital : un dépistage au coeur des débats

Le cytomégalovirus congénital (cCMV), principal facteur de surdité non génétique chez les nouveau-nés, suscite un débat croissant. Aux États-Unis, le projet de loi Stop CMV Act de 2024 démarre son processus législatif. En France, malgré des avancées, le dépistage systématique ne fait pas l’unanimité, avec des avis divergents sur son efficacité et sa mise en œuvre.

Par Lucien Brenet, publié le 02 septembre 2024

CMV Congénital : un dépistage au coeur des débats

Le cytomégalovirus congénital (cCMV) est la principale cause de surdité non génétique chez les nouveau-nés. L’infection de la mère par le cytomégalovirus pendant la grossesse peut atteindre le fœtus. Outre les problèmes vitaux pour les cas les plus graves, certains enfants exposés à ce virus in utero naîtront asymptomatiques puis développeront une surdité dans leur enfance.

Les conséquences sanitaires du CMV elles, commencent à être de plus en plus prises en considération par les pouvoirs publics outre-atlantique. En 10 ans aux États-Unis, les États ayant adopté une législation sur le sujet sont passés de un à 23. Si la plupart des Etats n’ont toujours pas mis en place de lois exigeant un dépistage systématique, les choses avancent.

Les travaux de groupes comme la National CMV Foundation (NCMVF), le programme Early Hearing Detection and Intervention (EHDI) et l’American Academy of Otolaryngology ont permis de sensibiliser et d’avancer sur l’adoption des tests de dépistages. Lesdits tests sont en outre devenus plus accessibles grâce à des méthodes moléculaires permettant d’obtenir des résultats plus rapidement et approuvés par la Food and Drug Administration (FDA), l’administration américaine en charge de la surveillance des denrées alimentaires et des médicaments.

Les Etat-Unis pourraient franchir un nouveau cap avec le Stop CMV Act de 2024 proposé au niveau fédéral. Ce texte de loi vise à instaurer un dépistage universel, à financer les tests et à améliorer la collecte de données sur le virus. Pour l’heure,  toutefois, ce projet de loi n’en est qu’au tout début de son parcours législatif.

En France, un dépistage qui fait débat

En France, certains professionnels de santé ont pris acte des récents progrès thérapeutiques pour ce type d’infection et plaident pour un dépistage systématique. À ce titre, un amendement au texte de loi de finances de la sécurité sociale pour 2024 (PLFSS 2024), concernant la mise en place d’un programme d’expérimentation de dépistage prénatal systématique du cytomégalovirus chez les femmes enceintes, a été adopté le 6 novembre 2023.

Cependant, en début d’année, le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) a actualisé son avis sur le dépistage de l’infection à cytomégalovirus (CMV) et demeure défavorable au dépistage systématique. Cette actualisation fait suite à la parution d’un essai randomisé contre placebo ayant étudié la possibilité de traiter par le valaciclovir les femmes ayant une primo-infection à CMV précoce, ce qui aurait diminué la transmission materno-fœtale du CMV.

Pour justifier son nouveau refus, le HCSP a invoqué un niveau de preuve « faible » et a souligné que l’étude n’avait pas mis en évidence l’efficacité sur les infections fœtales et congénitales ni sur les anomalies fœtales après infections fœtales. L’instance recommande de renforcer les mesures d’hygiène pour la prévention des infections et de poursuivre les recherches.

« Au lieu de se concentrer sur les données actualisées des travaux démontrant l’efficacité du traitement antiviral et les études médico-économiques françaises récentes, le HCSP s’est appuyé sur un grand nombre de publications antédiluviennes rendues obsolètes par l’amélioration de nos connaissances sur le sujet depuis dix ans », ont regretté des professionnels de santé dans une tribune publiée dans Le Monde en mars 2024. Ils reprochent au groupe de travail du HCSP son « incompétence (…) à évaluer les spécificités du dépistage prénatal ».

En France, ce type d’infection concerne 0,04 % des naissances. Si 90 % des enfants infectés sont asymptomatiques à la naissance, ils peuvent développer des séquelles tardives. Le risque de complications en cas d’infection materno-fœtale est de 15 à 18 % et peut notamment entraîner des troubles auditifs dans 12 % des cas.